Lucia Simeoni signe "Eurydice, mon amour" : un premier roman inspiré du mythe antique

Written on 07/14/2025
Christophe Giudicelli

Dans Eurydice, mon amour, Lucia Simeoni revisite le mythe d’Orphée à travers le regard de son héroïne. En donnant une voix moderne à Eurydice, l’autrice bastiaise propose une relecture féminine, poétique et contemporaine du mythe.

Lucia Simeoni publie "Eurydice, mon amour" : un premier roman inspiré du mythe, en dédicace à Bastia le 26 juillet

Comment décririez-vous votre roman ?
C’est une réinterprétation moderne du mythe classique d’Orphée et d’Eurydice. C’est une histoire qui explore la quête de soi, le pouvoir de l’amour et le lien indestructible entre la vie et la mort. Je ne me suis pas éloignée du mythe : il est présent, mais cette fois-ci, il est raconté du point de vue d’Eurydice, et il se déroule de nos jours, à Athènes, en 2025.

Nous connaissons le mythe d’Orphée. Pourquoi avoir pris le point de vue d’Eurydice ?
Je m’intéresse à la mythologie depuis que je suis enfant. Et plus les années passent, plus je me suis intéressée aux femmes de la mythologie. J’ai remarqué qu’elles étaient très souvent les déclencheurs des histoires des hommes. Pénélope est le déclencheur d’Ulysse, Méduse celui de Persée, et Eurydice celui d’Orphée.
En fait, Eurydice se marie et meurt le jour même. Nous n’en savons pas plus. Et je me suis dit : « Et si Eurydice avait sa voix aujourd’hui ? Et si elle avait un compte Instagram ? Et si elle pouvait nous raconter sa propre histoire ? » C’est comme ça qu’est né le roman.

Pourquoi avoir choisi ce mythe en particulier ?
Pour moi, Eurydice est un personnage magique, et j’aime tout ce qui touche à la fantaisie ou au fantastique. C’est une nymphe des forêts, et dans mon imaginaire, je l’imagine en train de gambader dans les bois. C’est très esthétique, poétique, et son histoire d’amour avec Orphée est magnifique. J’aime écrire sur les femmes sans dénigrer les hommes. Je veux continuer cette histoire d’amour, qui est très belle et très puissante. C’est ce qui m’a plu.

Orphée et Eurydice, c’est : Eurydice meurt, Orphée va aux Enfers pour la sauver. Il la regarde, et elle meurt une seconde fois. Que signifie ce mythe pour vous ?
Dans ce mythe, Orphée a dépassé toutes les espérances. Il est descendu aux Enfers chercher sa bien-aimée, alors que c’était interdit. Il y a le pouvoir de l’amour, le lien entre le monde des vivants et celui des morts. Il y a aussi les pièges d’Hadès, Orphée qui trépigne d’impatience, il y a un côté enfantin. Et puis, il y a la question de la confiance. C’est une tragédie, ça allait forcément mal finir.

Comment avez-vous transposé le mythe à notre époque ?

Ça se passe à Athènes, en 2025. Les personnages peuvent choisir ou non de s’habiller comme dans la Grèce antique. Il y a une forme d’immortalité, et c’est un monde où les dieux sont acceptés. On peut les croiser au café du coin sans que cela ne pose de problème. Les dieux restent des divinités que l’on vénère, que l’on implore, mais ils peuvent mener une vie tout à fait normale. C’est aussi le cas pour Eurydice : elle a un téléphone portable, elle a accès à des moyens de communication. On sent donc très vite que c’est un décor contemporain.

Autre époque, autres mœurs : peut-on imaginer une nouvelle relation entre les deux héros ?
Oui, elle change. Eurydice n’est pas juste l’amoureuse inconditionnelle. Elle est dans une quête d’elle-même. Elle se demande ce qu’elle serait sans Orphée, si elle peut avoir sa propre histoire. Elle est un peu mélancolique. Orphée est-il sa bouée de sauvetage ? Peut-elle se réinventer avec lui ? Je vous invite à lire le livre pour avoir les réponses !

Il y a tout un courant littéraire autour de la réécriture des mythes d’un point de vue féminin. On le voit avec Circé de Madeline Miller. Vous vous inscrivez dans ce courant ?
Madeline Miller que je porte dans mon cœur… Elle a une écriture à la fois moderne et d’un autre temps. Je pense que la mythologie fascine, elle attire la curiosité. Pourquoi y a-t-il plus de réinterprétations aujourd’hui ? Je ne saurais pas le dire exactement, mais je pense que c’est une évolution de l’humanité. On a envie de s’approprier des choses qu’on aime et de les transformer avec des critères contemporains, des problématiques contemporaines surtout.

C’est aussi remettre en avant toutes ces figures féminines de la mythologie. Présentes, mais toujours en retrait ?
C’est vrai : les femmes sont toujours au second plan, elles accompagnent le héros. Elles sont soit les déclencheurs d’histoires, soit les méchantes. Je pense qu’il y a une nouvelle génération qui a envie de se demander pourquoi, et d’aller un peu plus loin. On pourrait aussi écrire sur les hommes, il y a de très belles histoires à raconter !

Un livre sur Eurydice, mais aussi des podcasts sur les réseaux sociaux autour de la mythologie ?
Oui, j’ai créé un compte Instagram et un compte TikTok. Tous les lundis, j’enregistre ma voix sur des vidéos, et je parle chaque semaine d’une femme différente. J’ai déjà parlé de Circé, de Méduse, de Cassandre… C’est un peu comme si ces femmes avaient un petit compte Instagram.

Ce livre, c’est aussi, en tant qu’autrice bastiaise, une manière de se plonger dans votre culture méditerranéenne ?
Exactement. J’ai une passion pour la Méditerranée. Je vois la Corse dans son ensemble méditerranéen, et la Grèce en fait partie. D’ailleurs, j’aimerais trouver des traces de mythes liés à la Corse. On dit qu’Ulysse est passé au large de Bonifacio, mais on n’en a pas la preuve.

On peut imaginer que ce roman en appelle un second ?
Complètement. J’ai deux autres romans en préparation, l’un sur Méduse et l’autre sur Pénélope.