Une étude menée par Expédition MED en 2024 révèle une pollution record aux microplastiques dans le nord de la Méditerranée. Le Cap Corse, en particulier, est devenu une zone critique d'accumulation, mettant en danger l'équilibre des écosystèmes marins.
La Méditerranée n’a jamais été aussi polluée par les microplastiques. C'est le constat alarmant de l'association Expédition MED, qui analyse depuis plusieurs années les impacts de cette pollution sur les écosystèmes marins.
Lors de sa campagne 2024, l'équipe scientifique a enregistré des densités atteignant jusqu'à 2,041 millions de particules par kilomètre carré au large du Cap Corse. Par endroits, les quantités de plastique ont presque doublé en cinq ans. Les zones d'accumulation, comme le gyre situé entre le Cap Corse et l'île toscane de Capraia, concentrent jusqu'à 2 millions de particules par km², contre 1,25 million en 2019. "Cette soupe de plastique, déjà étudiée en 2019, est toujours présente, mais avec des concentrations bien supérieures , résume l’Expédition Med dans son rapport," publié jeudi 28 novembre. Des densités de microplastiques sans précédent ont été notamment mesurées près des villages de Barcaggio et du port de Centuri où une concentration de 156 328 particules par km² a été relevée, contre un maximum de 27 027 particules par km² mesurées en 2020 par la STARESO.
Une menace pour l'environnement et les espèces marines
Les microplastiques, issus de l'érosion de déchets mal gérés, sont transportés par les courants marins et s'accumulent dans des zones sensibles. « Nos observations montrent que le Cap Corse est une zone de piégeage naturel pour ces particules, en raison de la dynamique des courants. Mais cette particularité géographique transforme cette région en véritable point chaud de pollution », explique Nicolas Gosset, scientifique d'Expédition MED. Ces particules, souvent chargées de polluants chimiques, sont ingérées par des organismes marins emblématiques comme les poissons, les tortues et les oiseaux, menaçant leur survie. Cette contamination s'étend à la chaîne alimentaire et peut avoir des conséquences directes sur la santé humaine.
Même les réserves naturelles touchées
L'étude met également en évidence l'omniprésence de cette pollution dans des zones protégées. Des microplastiques ont été détectés au large de la réserve de Scandola, site inscrit au patrimoine mondial de l'UNESCO. "Lors de la campagne de 2024, nous avons identifié des zones de grande accumulation de plastiques à l’intérieur de réserves marines protégées surtout dans le Sanctuaire Pelagos. Cela renforce l’idée que la pollution plastique est transfrontalière et que des actions doivent être prises non seulement au niveau national, mais à l’échelle de tout le bassin méditerranéen ».
alerte l'océanographe, Ana Luzia Lacerda. Pour elle le suivi de ces zones d'accumulation est "crucial". En effet "les concentrations mesurées en Méditerranée sont quatre fois supérieures à celles du gyre du Pacifique Nord, pourtant considéré comme l'une des zones les plus polluées au monde."
Face à cette urgence, l'association appelle à réduire les sources de pollution plastique et à renforcer les mesures de gestion des déchets pour protéger l'un des écosystèmes marins les plus riches et fragiles du globe.