François-Xavier Bustillo, le très médiatique cardinal qui espère accueillir le pape en Corse

Written on 11/20/2024
CNI avec AFP

Parfois présenté comme un potentiel pape, le très populaire évêque d’Ajaccio, Mgr François-Xavier Bustillo, dénote par son exposition médiatique, d’Instagram à la Une de Paris-Match. Et cette réputation pourrait encore grandir avec une possible visite en Corse de François, le souverain pontife.
Le pape argentin souhaite en effet se rendre dans l’île de Beauté, et des contacts diplomatiques sont en cours entre le Vatican et l’Elysée autour d’un projet de visite mi-décembre, ont indiqué à l’AFP des sources proches du dossier.

Photo Paule SANTONI

« Je suis l’évêque de tous », assure à l’AFP ce Franco-Espagnol de 55 ans, fils de militaire né le 23 novembre 1968 à Pampelune, au pays basque espagnol. Nommé évêque de Corse en 2021, il a été fait cardinal par le pape François en septembre 2023.

Avant cela, ce franciscain à la taille de basketteur et l’accent chantant a étudié la philosophie et la théologie à Padoue (Italie) puis Toulouse avant d’officier à Narbonne (Aude) pendant 24 ans.  « Son accession au cardinalat a été une surprise, un jeune évêque avec deux ans d’épiscopat. Ca prouve sa proximité avec le pape », glisse à l’AFP un évêque.

Assurant ne pas avoir signé pour « entrer dans le Titanic et couler », François-Xavier Bustillo, fan de tennis et de nage en mer, estime que l’église catholique doit « faire rêver, pas pleurer ». Et depuis son arrivée dans l’île, il s’y emploie, suscitant une véritable « Bustillomania », comme l’ont démontré ces 800 Corses venus l’accompagner au Vatican pour son passage au rang de cardinal.
Puis en novembre 2023 c’est la couverture de Paris-Match.

Le magazine, propriété du milliardaire ultra-conservateur Vincent Bolloré, salue son « irrésistible ascension au sein de l’Eglise catholique », dans un article rédigé par l’un des co-auteurs de son livre, « Le cœur ne se divise pas ». Préfacé par le pape François, l’ouvrage a été publié chez Fayard, également propriété de Vincent Bolloré. Au même moment, dans « Quelle Epoque! », talk-show hebdomadaire sur France 2, Léa Salamé le présente comme « peut-être le prochain pape ». A ses côté ce soir-là, sur le plateau, l’ex-star du porno Clara Morgane, qui s’enthousiasmait d’avoir participé à « Bienvenue au monastère », une émission de téléréalité sur C8 tournée au couvent de Corbara, en Haute-Corse.
C8, chaîne du groupe Canal+, également dans le giron Bolloré.

 
« Il est original, c’est agréable cette modernité », confie à l’AFP une élue corse. De fait, l’évêque devenu cardinal est aussi très politique, dans une île dirigée par les autonomistes et en pleine négociation avec Paris. « La Corse doit retrouver son autonomie, sa liberté et sa capacité à gérer sa vie politique, économique, culturelle et même sanitaire », déclarait-il ainsi en janvier sur notre site d'information.

Légion d’honneur
A Ajaccio, en septembre 2023, Emmanuel Macron l’avait rencontré, hors programme officiel, avant de proposer à l’Assemblée de Corse « une autonomie dans la République » pour l’île méditerranéenne de 350.000 habitants.
Six mois plus tard, le 9 mars 2024, Mossa Palatina, parti nationaliste d’extrême droite aux antipodes des positions du pape en faveur des migrants, annonce sa création en invitant à une messe, avant un premier meeting. L’homélie est alors prononcée par le bras droit du cardinal, à la cathédrale d’Ajaccio. 
« Dans ce parti, il y a beaucoup de catholiques », pointe le cardinal, rejetant l’idée d’une messe dédiée: « La messe était pour tous, de droite ou de gauche ».

Fin août, le cardinal se fait remettre la Légion d’honneur par Mathieu Pacaud, restaurateur étoilé qui a notamment officié dans l’un des restaurants du luxueux domaine hôtelier de Murtoli (Corse-du-Sud), selon leurs comptes Instagram respectifs. « On a un lien amical », a précisé le cardinal à l’AFP.
Parmi la centaine de convives présents à l’évêché figurent Catherine Vautrin, alors ministre du Travail, et pas encore « Madame Corse » du gouvernement, mais aussi Paul Canarelli, propriétaire multicondamné du domaine de Murtoli, notamment, en première instance, pour recel de malfaiteur au procès de la cavale d’une figure du banditisme corse.

Selon un invité, du personnel de Murtoli avait à l’occasion servi à l’évêché. Ce qu’a contesté le cardinal: « Mathieu Pacaud m’a dit: +je m’occupe de tout+ », a-t-il expliqué, concédant que pour cette réception « beaucoup de personnes de Corse ont donné de la charcuterie et du vin ».
« Toute personne est digne d’être rencontrée, ça ne veut pas dire qu’on approuve ce qu’elle est », confie à l’AFP un évêque.