​Conflit des bus à Ajaccio : les syndicats vent debout après le communiqué de la CAPA

Written on 12/03/2025
Patrice Paquier Lorenzi

Alors que le conflit social au sein de la SPL Muvitarra semble s’enliser, le communiqué diffusé par la CAPA mardi sur les avantages sociaux des chauffeurs de bus ajacciens, cristallise la colère des syndicats. Ce mercredi, la CGT a réaffirmé que « les acquis ne sont pas des privilèges mais compensent des contraintes bien réelles auxquelles les travailleurs sont confrontés » tandis que FO évoque des contre-vérités et fausses informations. De son côté, le STC annonce « poursuivre la grève et dit attendre une réponse de la CAPA concernant de nouvelles propositions ». Une nouvelle réunion est prévue ce vendredi entre direction et syndicats.

Après les embouteillages monstres de ce mardi à Ajaccio, causés par le premier jour de grève des chauffeurs du réseau de bus Muvistrada initié par le STC, les Ajacciens ont dû s’accommoder pour ne pas revivre l’enfer du 2 décembre sur les routes de la cité impériale. D’autant que personne ne sait aujourd’hui quelle sera l’issue du conflit, alors même que les relations entre direction et les syndicats n’ont jamais semblé aussi tendues.

Après le blocage de l’entrée de ville par les manifestations et une vingtaine de bus, la CAPA avait réagi hier après-midi par le biais d’un communiqué cinglant.
« Ces méthodes sont d’autant plus inacceptables que, depuis 15 mois, la SPL Muvitarra et la CAPA n’ont cessé de tendre la main pour renégocier des accords d’entreprise devenus intenables à long terme, et introuvables dans aucun autre réseau de transport en France : jusqu’à 53 jours de congés par an, des salaires 30 à 40% supérieurs aux standards nationaux, une double prime de transport… », dénonçait la CAPA. Dans ce droit fil, la communauté d’agglomération pointait en outre un « absentéisme hors normes » avec « 780 jours d’arrêt maladie sur le seul mois de novembre », « 10 400 jours d’absence en 2024 », « un taux d’absentéisme moyen de 20 à 25 % avec des pics à 30%, quand la moyenne nationale du secteur s’élève à 8,9% » et des « coûts de fonctionnements largement supérieurs aux standards ».
 
« Aucun chiffre concret »

Ce mercredi après-midi, la CGT a souhaité à réagir à ces chiffres : « Nous contestons la méthode de comparaison des coûts d’exploitation entre Ajaccio et des villes du continent, estimant qu’elle est fondamentalement erronée. En effet, Ajaccio étant une ville insulaire située en Méditerranée, plusieurs facteurs spécifiques doivent être pris en compte : le prix du carburant y est plus élevé ; les pièces détachées doivent être acheminées depuis le continent, ce qui rallonge les délais de maintenance ; et plus généralement, tous les coûts logistiques dépassent la moyenne nationale », affirme le syndicat. Concernant la double prime de transport, il souligne que « contrairement à l’affirmation de la CAPA, il ne s’agit nullement d’une « double prime » ». « La première prime correspond à l’Indemnité pour frais de transports Corse, liée au coût de la vie chère sur l’île. La seconde est issue du premier accord interprofessionnel de France métropolitaine imposant à toutes les entreprises ayant des salariés en Corse de verser l’Indemnité trajet région Corse (ITRC), fruit d’un accord entre le patronat, dont le MEDEF, et les organisations syndicales. Il s’agit donc d’une spécificité insulaire et non d’un avantage propre à la SPL », détaille la CGT, avant de dénoncer le manque de dialogue au sein de la SPL Muvitarra : « Le président de la SPL n’a jamais fourni de chiffres concrets, tandis que les représentants de la CAPA ont multiplié les reports, organisé des réunions sans documents et mené des discussions sans base factuelle ».

Une réunion de la dernière chance ce vendredi ?

De son côté FO, qui a rejoint le mouvement de grève, ajoute que « la prime de transport et l’ensemble des primes périodiques ont précisément été négociées pour compenser cette cherté de la vie qui est, à Ajaccio, environ 14 % plus élevée que des villes du Continent où des conducteurs, payés 10 % de moins que nous, travaillent » et « demande à ce que soit organisée rapidement une réunion de médiation, en présence de l’Inspection du travail ». 

Des représentants de la CGT avaient assisté à une nouvelle réunion de négociations le matin même en présence de Laurent Andarelli, sirecteur au sein de la SPL, sans avancée notable, et en l'absence des représentants du STC, syndicat majoritaire et initiateur de la grève actuelle. Joint par téléphone, Sébastien Cerati, délégué STC, expliquait les raisons de son absence : « Nous attentons un retour des propositions que nous avons faites, il y a quelques jours. L’accord de méthode que l’on nous propose ne nous convient pas. D’autre part, nous ne comprenons pas l’absence de personnes décisionnaires à ces réunions et notamment de Jean-Paul Bonardi, le vice-président de la SPL à ces réunions. Dans l’attente, nous poursuivons donc notre mouvement demain et les jours à venir ».
 
Des commerçants inquiets

Selon nos informations, une nouvelle réunion est prévue ce vendredi entre les différents intervenants, elle pourrait même se tenir demain au vu des enjeux de plus en plus importants en cette période de Noël. Dans un communiqué transmis à notre rédaction, la Fédération des Commerçants du Centre-Ville d’Ajaccio s'alarme ainsi : « Nous souhaitons alerter toutes les parties de ce conflit sur les conséquences économiques pour le commerce du centre-ville déjà fortement fragilisé. Le mois de décembre représente un enjeu essentiel, nous avons des fournisseurs, des charges et surtout des salariés à payer, nous appelons à un retour rapide vers des négociations respectueuses du travail d'autrui et espérons que chaque partie engagée dans ce conflit saura prendre la mesure des conséquences de la situation actuelle ».