Pour ce troisième volet, Corse Net Infos s’intéresse à la sexualité des jeunes Corses. Comment cette génération aborde-t-elle le consentement, le plaisir, les pratiques sexuelles et les violences ? Entre ouverture, pression de la performance et besoin d’information concrète, Laurélène Cavallini-Negrel, sexothérapeute à Porto-Vecchio et Sartène, et Anaïs Mattei, sexothérapeute à Bastia, font le point sur les réalités et les défis auxquels les jeunes sont confrontés.
Les Corses et la sexualité (3/5) : les jeunes (Crédits photo: Elisa Timotei, exposition "l'amour dur.e"
Comment les jeunes Corses appréhendent-ils les questions autour de leur sexualité ? Sans faire de généralités, la sexothérapeute Laurélène Cavallini-Negrel avance un premier constat : « La nouvelle génération est plus précoce dans son exposition à la sexualité, mais aussi plus libre dans les codes, avec une fluidité des pratiques et des identités. » Un point confirmé par Anaïs Mattei, sexothérapeute à Bastia : « Les jeunes ont une sexualité plus ouverte que leurs aînés. »
Le culte de la performance et ses conséquences
Pourtant, dans leur sexualité, les jeunes sont aussi happés par « le culte et la pression de la performance », explique Laurélène Cavallini-Negrel. Ces modèles, véhiculés par les réseaux sociaux ou les sites pornographiques, constituent « un point de comparaison inédit dans l’histoire ».
Ce phénomène se retrouve au cœur des consultations, même si les moins de 30 ans ne sont pas les plus nombreux à consulter, et que les mineurs nécessitent l’autorisation parentale. Dans l’intimité du cabinet, ils exposent pourtant leurs problématiques :
« On retrouve surtout des questions liées à la performance, surtout chez les garçons, et chez les filles, la perte de désir. Il y a aussi des questionnements autour du relationnel, comme la jalousie, et des traumatismes liés à des violences sexuelles. Cela génère une vraie souffrance, mais ces jeunes ont une grande capacité à évoluer quand on leur donne les bons outils », raconte Laurélène Cavallini-Negrel.
Une parole plus libre sur le consentement et les violences
Une génération en demande d’information, note Anaïs Mattei : « Ils sont mieux informés sur le consentement : les limites, la douceur, la communication. Cela se démocratise. Ceux qui le pratiquent remarquent qu’il y a plus de confiance et que la pression diminue. Les relations sexuelles sont plus saines, mais ce n’est pas encore le cas pour tous. »
Malgré ces progrès, Laurélène Cavallini-Negrel rappelle que la réalité reste inquiétante : « Il y a beaucoup de cas de violence et de harcèlement. On constate que certains jeunes pensent que l’autre leur appartient. La jalousie, la violence sexuelle… certains se sont fait droguer ou alcooliser. Et des situations prévues à deux se retrouvent à trois. Les femmes restent les plus concernées. »
Prévenir et reconnaître les violences dès le plus jeune âge
Pour Anaïs Mattei, la prévention doit commencer dès l’école maternelle, avec des mots adaptés aux enfants : « Quand un petit dit : ‘Mon camarade m’a touché là ou là, ce n’est pas normal’, c’est là que l’éducation sexuelle doit intervenir. Il faut expliquer que non, c’est non, que ce n’est pas normal, avec des mots d’enfants. Ils doivent en avoir conscience et pouvoir en parler. »
L’éducation à la sexualité reste un tabou dans la société : comment en parler sérieusement sans infantiliser les adolescents, et en évitant les critiques de ceux qui voient dans l’éducation sexuelle une perversion de la jeunesse ?
« C’est le problème de l’éducation nationale : beaucoup ne sont pas d’accord », note Anaïs Mattei. Pour Laurélène Cavallini-Negrel, « on édulcore pour ne pas choquer les familles ». Toutes deux s’accordent sur un point : l’éducation sexuelle doit passer par l’école. La famille, elle, reste un espace difficile à aborder : « C’est normal, un parent ne veut pas penser à la sexualité de son enfant et inversement. »
Un besoin d’information concret et réaliste
Ce tabou a des conséquences : des jeunes manquent d’information et se tournent vers la pornographie, dont la mise en scène est loin de la réalité.
« Ils attendent du concret, des réponses claires, comprendre leur corps, le consentement, les pratiques, sans jugement et loin des discours moralisateurs. Ils veulent une éducation qui parle leur langage », explique Laurélène Cavallini-Negrel.
Ils attendent aussi des réponses pratiques, souligne Anaïs Mattei : « Sur la pilule, notamment, et les derniers scandales liés à son utilisation.»
Mais l’éducation sexuelle ne doit pas se limiter à la prévention, elle doit aussi intégrer la notion de plaisir, longtemps occultée. Laurélène Cavallini-Negrel souligne :« On parle beaucoup de biologie et de prévention, désormais de consentement, mais trop peu de désir. Dans les livres de SVT, le clitoris n’apparaissait même pas. Parler du clitoris, c’est parler du plaisir, car c’est un organe dédié à 100 % au plaisir. Et si ça n’apparaît pas, le message est clair : le plaisir, on s’en fout. » Pour Anaïs Mattei, le plaisir ne doit pas être un tabou : l’école doit en faire l’écho et enseigner cette dimension de la sexualité. Sur les réseaux sociaux, de nombreux comptes, notamment ceux des deux sexologues insulaires, abordent déjà cette thématique du plaisir en parallèle de la santé sexuelle.
Le culte de la performance et ses conséquences
Pourtant, dans leur sexualité, les jeunes sont aussi happés par « le culte et la pression de la performance », explique Laurélène Cavallini-Negrel. Ces modèles, véhiculés par les réseaux sociaux ou les sites pornographiques, constituent « un point de comparaison inédit dans l’histoire ».
Ce phénomène se retrouve au cœur des consultations, même si les moins de 30 ans ne sont pas les plus nombreux à consulter, et que les mineurs nécessitent l’autorisation parentale. Dans l’intimité du cabinet, ils exposent pourtant leurs problématiques :
« On retrouve surtout des questions liées à la performance, surtout chez les garçons, et chez les filles, la perte de désir. Il y a aussi des questionnements autour du relationnel, comme la jalousie, et des traumatismes liés à des violences sexuelles. Cela génère une vraie souffrance, mais ces jeunes ont une grande capacité à évoluer quand on leur donne les bons outils », raconte Laurélène Cavallini-Negrel.
Une parole plus libre sur le consentement et les violences
Une génération en demande d’information, note Anaïs Mattei : « Ils sont mieux informés sur le consentement : les limites, la douceur, la communication. Cela se démocratise. Ceux qui le pratiquent remarquent qu’il y a plus de confiance et que la pression diminue. Les relations sexuelles sont plus saines, mais ce n’est pas encore le cas pour tous. »
Malgré ces progrès, Laurélène Cavallini-Negrel rappelle que la réalité reste inquiétante : « Il y a beaucoup de cas de violence et de harcèlement. On constate que certains jeunes pensent que l’autre leur appartient. La jalousie, la violence sexuelle… certains se sont fait droguer ou alcooliser. Et des situations prévues à deux se retrouvent à trois. Les femmes restent les plus concernées. »
Prévenir et reconnaître les violences dès le plus jeune âge
Pour Anaïs Mattei, la prévention doit commencer dès l’école maternelle, avec des mots adaptés aux enfants : « Quand un petit dit : ‘Mon camarade m’a touché là ou là, ce n’est pas normal’, c’est là que l’éducation sexuelle doit intervenir. Il faut expliquer que non, c’est non, que ce n’est pas normal, avec des mots d’enfants. Ils doivent en avoir conscience et pouvoir en parler. »
L’éducation à la sexualité reste un tabou dans la société : comment en parler sérieusement sans infantiliser les adolescents, et en évitant les critiques de ceux qui voient dans l’éducation sexuelle une perversion de la jeunesse ?
« C’est le problème de l’éducation nationale : beaucoup ne sont pas d’accord », note Anaïs Mattei. Pour Laurélène Cavallini-Negrel, « on édulcore pour ne pas choquer les familles ». Toutes deux s’accordent sur un point : l’éducation sexuelle doit passer par l’école. La famille, elle, reste un espace difficile à aborder : « C’est normal, un parent ne veut pas penser à la sexualité de son enfant et inversement. »
Un besoin d’information concret et réaliste
Ce tabou a des conséquences : des jeunes manquent d’information et se tournent vers la pornographie, dont la mise en scène est loin de la réalité.
« Ils attendent du concret, des réponses claires, comprendre leur corps, le consentement, les pratiques, sans jugement et loin des discours moralisateurs. Ils veulent une éducation qui parle leur langage », explique Laurélène Cavallini-Negrel.
Ils attendent aussi des réponses pratiques, souligne Anaïs Mattei : « Sur la pilule, notamment, et les derniers scandales liés à son utilisation.»
Mais l’éducation sexuelle ne doit pas se limiter à la prévention, elle doit aussi intégrer la notion de plaisir, longtemps occultée. Laurélène Cavallini-Negrel souligne :« On parle beaucoup de biologie et de prévention, désormais de consentement, mais trop peu de désir. Dans les livres de SVT, le clitoris n’apparaissait même pas. Parler du clitoris, c’est parler du plaisir, car c’est un organe dédié à 100 % au plaisir. Et si ça n’apparaît pas, le message est clair : le plaisir, on s’en fout. » Pour Anaïs Mattei, le plaisir ne doit pas être un tabou : l’école doit en faire l’écho et enseigner cette dimension de la sexualité. Sur les réseaux sociaux, de nombreux comptes, notamment ceux des deux sexologues insulaires, abordent déjà cette thématique du plaisir en parallèle de la santé sexuelle.